Cette classe thérapeutique des anti-arthrosiques d’action lente (AASAL) comprend 4 molécules : la glucosamine sulfate, la chondroïtine sulfate, les insaponifiables d’avocat soja (IAS) et la diacerhéine. Dans cet article, les références bibliographiques se rapportent à la glucosamine sulfate, seul AASAL à ce jour à avoir démontré la prévention du recours à la chirurgie prothétique. La Glucosamine (GLcn) a rempli les 4 objectifs déterminants son efficacité en tant qu’anti arthrosique.
1- Effet symptomatique des anti-arthrosiques d’action lente (AASAL)
La glucosamine a une action sur les douleurs et la fonction articulaire (mobilité),cet effet est lent (délai d’action de 1 à 4 mois) en raison de son mode d’action naturel sur le tissu cartilagineux (qui est non vascularisé) à taux de renouvellement extrêmement ralenti (demi-vie de 1000 jours pour les protéoglycanes) et quasi inexistant pour le réseau de collagène. Cependant, une fois incorporée au tissu cartilagineux, la GLcn continue son effet même en absence de prise continue, c’est ce que l’on appelle l’effet rémanent.
Pour autant, une arthrose évoluée bénéficie au mieux d’un traitement prolongé voire ininterrompu compte tenu de l’importance des lésions. La démonstration statistiquement significative d’un effet symptomatique lent a été apportée par plusieurs essais thérapeutiques évaluant les divers AASAL (1),(2),(3),(4).
2- Effet d’épargne du traitement symptomatique conventionnel
Au même titre que le paracétamol, traitement de référence (EULAR) en première intention comme antalgique dans la gonarthrose et la coxarthrose, la Glucosamine sulfate a démontré une différence positive contre placebo quant au recours aux anti inflammatoires non stéroïdiens (AINS). Cette différence atteint la significativité statistique sur une période de 6 mois dans la grande étude GUIDE. (5),(10)
3- Ralentissement de la dégradation du cartilage : effet structural
En considérant comme « progression radiologique » toute diminution de hauteur de l’interligne articulaire dépassant une potentielle erreur de mesure, il a pu être démontré un effet structural avec la glucosamine sulfate (1) (2). La démonstration statistique d’un effet structural est démontrée en recherche (6). L’effet taille (différence entre l’effet du produit et l’effet Placebo) est retenu pour la glucosamine dans la méta-analyse de TE Mac Alindon et col (7).
4- Prévention du recours à la chirurgie prothétique articulaire
Dans les études évaluant le sulfate de glucosamine, le risque de recourir à la chirurgie articulaire a été évalué dans les 5 années suivant les 3 années durant lesquelles les patientes recevaient le traitement à l’étude (Sulfate de glucosamine vs Placebo). Un effet thérapeutique de 27 % avec la glucosamine a été observé atteignant la significativité statistique (p= 0,021). (8)
La tolérance apparaît excellente avec l’ensemble des molécules de la famille des AASAL.
On note toutefois quelques cas d’intolérance hépatique pour les IAS chez des patients insuffisants hépatiques, des rares cas d’allergie cutanée avec la chondroïtine sulfate, des épisodes colitiques voire diarrhéiques avec la diacérhéine ainsi qu’une coloration rouge des urines sans conséquence médicale mais dont le patient doit être informé.
Pour la glucosamine, aucun effet secondaire n’est référencé, par principe de précaution on évitera son emploi chez les rares patients allergiques aux crustacés.
En termes de coût direct et indirect pour la société, il apparaît que cette classe des AASAL permet au prix d’une excellente tolérance une économie de traitements conventionnels et du recours à la chirurgie prothétique tout en espérant pour les patients un moindre risque de dépendance locomotrice et sociale. Le suivi des patients arthrosiques devrait comprendre d’après le Professeur Maxime Dougados, une évaluation de la douleur par échelle visuelle analogique EVA ou verbale EV voire numérique EN, de la fonction par l’indice de Lequesne ou indice de Womac selon les articulations concernées et un bilan radiographique comparatif espacé selon la vitesse d’évolution supposée et ajustée au cas par cas (1 à 2 ans).
Conclusion
Cette famille de médicaments ou alicaments dits traitements de fond s’intègre parfaitement dans la stratégie globale de lutte contre l’arthrose en traitant naturellement le tissu principalement lésé (cartilage). La prise en charge tissulaire reste complémentaire du traitement des poussées congestives et des moyens non pharmacologiques selon les recommandations européennes.
Que ce soit en termes d’efficacité, de tolérance ou de coût, cette classe thérapeutique répond positivement au besoin de la population arthrosique et mérite d’être utilisée largement, en tenant compte de son délai d’action, dans le cadre de prescriptions prolongées.
Bibliographie
1-Reginster JY, Deroisy R, Rovati LC, Lee RL, Lejeune E, Bruyere O. Long-term effects of glucosamine sulfate on osteoarthritis progression: a randomised, placebo-controlled clinical trial.
Lancet 2001;357:251-6
2-Pavelka K, Gatterova J, Olejarova M, Machacek S, Giavocelli G, Rovati LC . Glucosamine sulphate use and delay of progression of knee osteoarthritis: a 3-year, randomized, placebo-controlled, double blind study.
Arch.Intern.Med.2002;162:2113-23.
3-Jordan KM, Arden NK, Doherty M, Bannwarth B, Bijlsma JW, Dieppe P. Eular Recommandations 2003:an evidence based approach to the management of knee osteoarthritis: Report of a Task Force to the standing Committee for International Clinical Studies Including Therapeutic Trials (ESCISIT).
Ann.Rheum.Dis. 2003;62/1145-55
4-Zhang W,Doherty M, Arden N, Bannwarth B, Bijlsma JW, Gunther KP.Eular evidence based recommendations for the management of hip osteoarthritis: report of a task force of the Eular Standing Committee for International Clinical Studies Including Therapeutic Trials (ESCISIT).
Ann.Rheum.Dis. 2005;64:669-81
5-Herrero-Beaumont G, Roman JA, Trabado MC, Blanco FJ, Benito P, Martin-Mola E. Effects of glucosamine sulphate on 6-month control of knee osteoarthritis symptoms vs placebo and acetaminophen: results from the glucosamine unum I die efficacy (GUIDE )trial.
Arthritis Rheum 2005;9 (Suppl)1230.
6-Brandt KD, Mazzuca SA. Lessons learned from nine clinical trials of disease-modifying osteoarthritis drugs.
Arthritis Rheum 2005;11:3349-59
7-Mac Alindon TE, La Valley MP, Gulin JP, Felson DT. Glucosamine and chondroitin for treatment of osteoarthritis :a systematic quality assessment and meta-analysis.
JAMA 2000;283:1469-75
8-Pavelka K, Gatterova J, Giavocelli G, Olejarova M, Rovati LC.Effect of glucosamine sulphate on total joint replacement, time to surgery and outcome predictors:5-year follow-up of a 3-year trial in knee osteoarthritis.
Ann.Rheum.Dis. 2005;64 (Suppl):481.
9-Dougados M, Symptomatic slow-acting drugs for osteoarthritis: what are the facts?
Joint Bone Spine 2006, in press.
10- Gabriel Herrero-Beaumont, José Andres roman Ivorra, Maria del Carmen Trabado, Francisco Javier Blanco, Pere Benito, Emilio Martin – Mola, Javier Paulino, José Luis Marenco, Armando Porto, Armando Laffon, Domingos Araujo, Manuel Figueroa, and Jaime Branco.
Glucosamine Sulfate in the Treatment of Knee Osteoarthritis Symptoms : A randomized, Double-blind, Placebo-controlled Study Using Acetaminophen as a Side Comparator
Arthritis Rheum 2007;56:555-67