Un tendon peut-il se réparer ?
Cicatrisation tendineuse
Les phénomènes de cicatrisation peuvent être divisés en trois phases : une phase inflammatoire, une phase de réparation puis une phase de remodelage.
La phase initiale inflammatoire dure une semaine environ
Les cellules inflammatoires : plaquettes, polynucléaires neutrophiles, macrophages migrent rapidement vers le site lésionnel et sécrètent des facteurs vasoactifs et chimiotactiques.
Quelques jours après le traumatisme, la phase de réparation débute
Cette phase dure quelques semaines. Les fibroblastes stimulés par l’inflammation du site lésé produisent le collagène et les éléments de la matrice extracellulaire. À la sixième semaine, la phase de remodelage prend le relais, le nombre de cellules diminue, la synthèse moléculaire également. Le tissu conjonctif cicatriciel se modifie et est transformé progressivement en tissu tendineux vers la 10e semaine mais avec une proportion de collagène III plus importante.
Après cette période, le tissu continue à se modifier pour se rapprocher de plus en plus de la morphologie et des propriétés mécaniques tendineuses initiales. Le tissu cicatriciel reste pendant très longtemps moins résistant que le tendon non traumatisé.
Les contraintes doivent être évitées durant la phase inflammatoire (environ 1 semaine) afin de limiter les altérations du tissu cicatriciel primitif particulièrement fragile. Au cours des phases suivantes, la mobilisation tendineuse permet de limiter les adhérences et d’augmenter les propriétés mécaniques. La diminution des adhérences, dont l’apparition est considérée comme partie intégrante du processus de cicatrisation, est une justification aux techniques de mobilisation précoce.
Quels sont les traitements pour les tendinites ?
Il faut toujours traiter en fonction de la cause, bien sûr : infectieuse, inflammatoire, tumorale…
Pour les tendinites les plus fréquentes, mécaniques dites du sportif, le traitement est médicamenteux et non médicamenteux :
- Médicamenteux
Pour soulager, on propose la prise d’antalgiques, d’anti-inflammatoires non-stéroïdiens (non-cortisoniques) généraux et en topiques (pommades), en urgence la cortisone peut être nécessaire (bursite microcristalline) sur une durée brève, enfin les infiltrations cortisoniques en se méfiant du risque de rupture iatrogène. Les infiltrations cortisoniques sont parfois radio ou échoguidées.
La Mésothérapie apporte un complément thérapeutique dans maintes situations, elle utilise des ains injectables, de la péridyl héparine, des myorelaxants et anesthésiques locaux… Le principe est « peu de produit mais au bon endroit » dans le mésoderme en regard du tendon pathologique.
D’autres traitements expérimentaux (hors AMM) mériteraient confirmation avant un usage plus étendu :
- patchs de trinitrine (vasodilatateur veineux)
- injections intratendineuses (IT) d’aprotinine (antifibrinolytique, P Rochcongar)
- injections IT d’acide hyaluronique
- injections IT de tropisetron (T Stratz), antagoniste 5ohTrytamine 3
- injections IT de solution hyperosmolaire de dextrose
- injections IT de polidocanol
Et les traitements de fond dans les tendinites récidivantes ou chroniques ?
La glucosamine so4 et chondroitine so4, per os mériteraient d’être tentés, ces substances étant contenues dans la matrice extracellulaire des tendons.
La Vitamine C, le Zinc, le Silicium et le Fer stimulent la synthèse de collagène et la réparation tissulaire tendineuse.
- Non médicamenteux
La correction des facteurs causals extrinsèques ou intrinsèques de pérennisation est un préalable indispensable dans la prise en charge des tendinopathies mécaniques. Dans la phase aigüe, le repos relatif du tendon pathologique (strapping, taping, orthèses ou attelles mais sans immobilisation stricte, hormis les styloidites) associé au glaçage permet d’obtenir rapidement une atténuation de la douleur.
La prise en charge kinésithérapeutique peut comprendre des soins de :
-Physiothérapie : effet mécanique de l’ultrasonothérapie (LIPUS : low-intensity pulsed ultrasound therapy), effet électrochimique des ionisations, ionophorèses, effet cicatrisant et vasculaire des ondes courtes…).
-Les ondes de choc extracorporelles (TEOC) ou (LESWT= low-energy shock wave therapy) consistent à générer des néo-lésions fraiches sur une lésion tendineuse ancienne afin obtenir une néo-vascularisation initiatrice d’une guérison potentielle. On utilise en général des ODC radiales au contact direct de la lésion tendineuse, souvent douloureusement perçues par le patient compte tenu du lien entre l’intensité des ondes et le résultat attendu.
-Les ondes lumineuses LASER (light amplified stimulating emission radiation) ou LLT (low laser therapy) semblent intéressantes mais manques de preuves scientifiques bien établies.
-Outre les techniques proprement kinésithérapeutiques : les massages transverses de Cyriax (mtp) défibrosants et vasculoactifs, les renforcements myotendineux et les mises en tension des fibres de collagène passifs et actifs protocolisés dès que la régression de la douleur l’autorise.
Ces protocoles sont fondés sur la propriété essentielle du tissu collagène de répondre à une mise en tension par un renforcement et un alignement de ses fibres dans la direction des forces exercées. Il faut donc appliquer des forces maximales tolérables en deçà du seuil de rupture.
En pratique, chaque séance comprend, après un échauffement global, une première phase d’étirements passifs, un travail statique, un travail ciblé concentrique (le muscle sert de moteur au mouvement) et surtout excentrique (Stanish : le muscle sert de frein au mouvement), puis une deuxième phase d’étirements et enfin un temps de physiothérapie glaçage.
Au fil des séances, l’intensité de la sollicitation progresse, d’abord sur l’augmentation de la vitesse du travail excentrique puis sur la résistance en absence de douleur.
Les techniques isocinétiques permettent de limiter les phénomènes algiques. Classiquement, la durée des programmes de rééducation des tendinopathies chroniques est d’au moins 6 semaines et maximum de 6 mois.
L’acupuncture peut dans certains cas apporter un soulagement favorisant la rééducation.
Wait and see : « Attendre et voir » l’abstention thérapeutique surveillée, est préconisée par certains auteurs en considérant la guérison acquise spontanément en 1 à 2 ans. Cependant cette attitude attentiste est aléatoire et psychologiquement incorrecte, même si parfois il vaut mieux s’abstenir que de nuire notamment par le biais d’infiltrations répétées (maximum 3 autorisées par an) ou mal maitrisées.
La Chirurgie rarement indiquée vit des échecs des traitements conservateurs après avoir assuré le diagnostic lésionnel par l’imagerie.
Parfois c’est le contexte sportif qui l’exige pour le sportif de haut niveau. Selon la forme anatomopathologique et au cas par cas, il peut s’agir de techniques de réparations tendineuses bien codifiées à l’épaule (sutures, réinsertions…), de ténolyse, synovectomie, ténotomie à ciel ouvert ou percutanée, de débridement, de peignage (splitting), de transfert tendineux ou ostéotendineux, d’accourcissement ou plastie, de déinsertion allongement, de bursectomie, d’excision arthroscopique d’une calcification, d’excision de nodules ou kystes intratendineux suivie de suture reconstitution tendineuse… Compte tenu de la diversité des tendinopathies et des différentes techniques chirurgicales, il n’est pas possible de donner des résultats généraux.
Tout au plus, peut-on dire avec JF Kouvalchouk que la chirurgie des tendinopathies nodulaires, des pseudokystes, des ruptures partielles ou des ténosynovites aboutit dans l’ensemble à environ 80 % de résultats satisfaisants autorisant la reprise du sport dans un délai de 3 à 6 mois selon le type de lésion et son traitement. Les critères de reprise sont fonction de l’examen clinique et non fondés sur l’imagerie très difficile à interpréter sur un tendon opéré.
Et l’avenir ?
Actuellement, de nombreuses recherches d’ingénierie tissulaire sont réalisées afin de pouvoir créer un tissu tendineux dont le métabolisme cellulaire et les propriétés mécaniques sont les plus proches des caractères natifs du tendon. Les cellules les plus adaptées à la recolonisation d’un tissu tendineux naturel ou artificiel peuvent être les ténocytes, les fibroblastes de l’épitendon, les cellules souches mésenchymateuses provenant de la moelle osseuse ou du tissu adipeux. La combinaison de thérapie cellulaire (cellules souches) et de facteurs de croissance (plaquettaires, IGF-1, FGF…) par transfert génique in situ (injection intratendineuse) pourrait dans un avenir proche améliorer la cicatrisation tendineuse chez les sportifs professionnels.